Dans le cadre de la loi dite "pour la liberté de choisir son avenir professionnel", portée par la ministre du Travail Muriel Pénicaud et votée par le Parlement à l'été 2018, les Organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) vont être remplacés par des Opérateurs de compétences (OPCO), des structures chargées d'assurer le financement des contrats d'apprentissage et de professionnalisation, d'élaborer une gestion prévisionnelle des emplois et de leurs compétences, et enfin de financer les plans de formation des PME-TPE. De fait, les organisations professionnelles représentatives sont tenues de signer au moins un accord les rattachant à un OPCO. Dans le bâtiment comme dans les autres secteurs d'activité, les négociations ont commencé, mais la tournure que prennent les évènements risque-t-elle de diviser la profession ? Alors que les fondations du futur OPCO de la Construction sont en train de se mettre en place, les deux principales organisations du secteur, la Capeb (Confédération des artisans et petites entreprises du bâtiment) et la FFB (Fédération française du bâtiment), affichent en effet leur désaccord.
À cheval sur les OPCO de la construction et des entreprises de proximité
"Historiquement, nous avons participé à la création de l'OPCA de la Construction, et depuis 2011, nous sommes dans son giron. Donc nous avons fait le choix de participer aux négociations d'aujourd'hui sur l'OPCO", explique le trésorier adjoint de la Capeb, Jean-Christophe Repon, contacté par Batiactu. "Mais devant la qualité négative et la non-écoute résultant de ce nouvel accord, nous avons décidé de rejoindre l'OPCO Pepss [Opérateur de compétences des professions de proximité et de ses salariés, ndlr]." Cette structure, chapeautée par l'Union des entreprises de proximité (U2P), présenterait l'avantage de mieux représenter les adhérents de la Capeb, qui sont pour l'écrasante majorité des TPE-PME. Car le problème est bien là : la confédération reproche à l'OPCO de la Construction de ne pas prendre en considération les petites structures, et de passer à la trappe leurs spécificités. "La Capeb doit être en mesure de proposer des services de formation aux TPE, donc concrètement aux entreprises de moins de 11 salariés, qui disposent de contributions conventionnelles particulières. Nous voulions retranscrire cet aspect dans le champ d'application de l'OPCO, mais la FFB a refusé."
Le dernier mot reviendra au Gouvernement
Pour rappel, les contributions à la formation professionnelle s'élèvent à 0,35% de la masse salariale pour les entreprises de moins de 11 salariés, et à 0,20% pour les structures de taille supérieure. Or les représentants de la Capeb craignent la mise en place d'un "pot commun", mettant au même niveau petites et grandes entreprises : "Tout le monde se servira dans ce pot mutualisé, quelle que soit sa taille. Dans ces conditions, nous n'avons eu d'autre choix que de signer l'accord de l'OPCO Pepss, par souci de responsabilité. Mais il était en même temps inenvisageable que notre organisation ne fasse pas partie de l'OPCO de la Construction", insiste Jean-Christophe Repon. Au final et dans tous les cas, le Gouvernement tranchera en analysant la cohérence des champs des différents OPCO avec lesquels l'organisation a signé un accord.
Difficile marge de manœuvre donc pour la confédération, qui se retrouve dans un périmètre contraint. "Notre but reste le même : défendre nos entreprises, et leur proposer des services de qualité pour qu'elles puissent monter en compétence. Mais nous resterons vigilants sur la poursuite des négociations. Face à la volonté hégémonique de la FFB de régner sur l'OPCO de la Construction, il n'est pas pensable que les 400.000 petites entreprises du bâtiment ne soient pas représentées."